En sanskrit, Mulā signifie racine, et Bandha, verrou.
Sur le plan physique, ce bandha a de nombreux intérêts, notamment sur le renforcement du périnée (vous le verrez dans cet article).
D'un point de vue énergétique, il nous sert à "verrouiller notre base", et donc à empêcher la fuite de Apana, l'énergie descendante, pour pour pouvoir la rediriger et la contrôler.
Mulā Bandha se traduit comme le verrou racine, la fermeture de la base. Jusque-là, dans mes nombreuses recherches, toutes les écoles yoguiques semblent d’accord.
C’est ensuite que les choses se « compliquent », et que les avis peuvent diverger, notamment sur cette question:
Où est-il situé sur notre corps physique ?
Je vous rassure, cela ne part pas non plus dans tous les sens !
Globalement, j’ai rencontré deux façons de localiser Mula Bandha 🕵️♀️ . Pour certain.e.s, il faut contracter le périnée. Pour d’autres, c’est le sphincter anal qui est concerné. J'ai sélectionné ces trois sources, que je trouve pertinente. Dans le Hatha-Yoga-Pradîpikâ, Mula Bandha est définit ainsi: " Pressant le périnée avec le talon, on doit contracter l'anus et aspirer l'apāna vers le haut, c'est ce que l'on appelle le mūla-bandha. " (Hatha-Yoga-Pradîpikâ, Introduction, traduction et commentaires par Tara Michaël, p.186)
Le Gheranda-Samhita III, 14-17, (traduction de Tara Michaël) mentionne également l'utilisation du talon, et va même plus loin:
"Presser le périnée avec le talon du pied gauche, et contracter le rectum ; presser soigneusement le noeud du nombril, contre l'axe du Meru (la colonne vertébrale). Avec la cheville droite, former un ferme bandha en l'appuyant contre l'organe génital. Cette mudrā, qui arrête le vieillissement, est appelé mūla-bandha."
BKS Iyengar (dans son livre Prānāyāma Dīpikā, Lumière sur le Prānāyama, p.124-125) quant à lui, explique : "On emploie ce terme (ndlr Mūla) pour désigner la région fondamentale située entre l'anus et les parties génitales. Contractez les muscles de cette zone et faîtes-les remonter verticalement vers le nombril." Iyengar mentionne également la contraction des muscles du sphincter anal sous le nom de Aśvini mudrā (Aśva = cheval), et que pratiquer ce dernier aiderait à maîtriser Mūla bandha. Voilà pour la partie théorie / bibliographie.
Maintenant, un peu d'anatomie : intéressons-nous au périnée et à sa structure… Tout d’abord, femmes ET hommes en sont dotés. Et oui ! C’est souvent un muscle dont on entend parler après l’accouchement, ou bien lors de descente d’organe. Mais il faudrait lui porter une attention particulière dès le plus jeune âge car il est super complexe, et il situé à un endroit stratégique du corps.
Ce qu’il faut retenir, si on synthétise, c’est que le périnée, qui est aussi appelé plancher pelvien, est un ensemble de muscle et de fascias, situés entre le coccyx et le pubis. Il permet de soutenir tout ce qui se trouve au-dessus : les organes génitaux, viscères, etc… et il a aussi un lien avec le diaphragme ! (ce périnée mériterait un article à lui tout seul, mais en attendant, je vous invite vivement à faire vos recherches personnelles 😀)
D’un point de vue anatomique, c’est une partie du corps clé en yoga, que l’on va chercher à connaitre, et à protéger, on le verra comment, dans la pratique, dans un prochain article.
Une image valant mieux que des mots, voici comment on peut représenter le périnée:
Ce schéma nous montre que les deux façons de localiser Mula Bandha (citées précedemment) se rejoignent.
Lorsque certain.e.s parlent de la contraction du sphincter anal, celui-ci fait en réalité partie des muscles du périnée. Donc les deux définitions ne sont pas complètement en désaccord. Alors s’en suit logiquement cette question : « Comment vais-je faire, en tant que pratiquant.e, pour trouver Mula Bandha, alors que les définitions divergent tout de même un peu ? »
Mon conseil, qui est purement personnel, est le suivant. 1 / Tout d’abord, trouve ce qui te parle pour ressentir cette zone. Voilà différentes techniques :
- Contracter le sphincter anal (il ne faut pas serrer les fesses, c’est vraiment uniquement les muscles du sphincter). On ressent une zone qui se resserre, et qui remonte.
- « Le stop pipi », expression souvent utilisée, de laquelle il faut se méfier car attention, quand vous êtes vraiment en train d’urinier, le fait d’arrêter volontairement le jet est déconseillé. Il faut la voir ici comme une description de nos sensations. Imaginez-vous en train de faire pipi, et vous souhaitez stopper volontairement le jet. Observez quelle partie de votre périnée semble se contracter ! En général, c’est plutôt l’avant, ou le milieu.
- Certain.e.s peuvent aussi ressentir cette zone en "toussant".
2 / Lorsque tu as ressenti une réaction, tu as trouvé ton verrou, Mulā Bandha.
Si une seule des propositions ci-dessus a fonctionné, continue à le pratiquer de cette façon. Avec le temps, tu remarqueras peut-être que tu peux contracter l’avant, l’arrière, le centre, et même les trois en même temps. Cette sensibilité se développe avec la pratique.
C’est ainsi que l’on arrive à un 2 bis. 2 bis / Si tu as ressenti plusieurs façons de fermer Mulā Bandha: Tu peux te demander "laquelle choisir" ? En effet, tu comprends peut-être maintenant pourquoi les définitions divergent. D’abord, c’est humain, peut-être que les connaissances anatomiques, les sensations de chacun, et les façons de s’exprimer ne sont pas les mêmes pour tous et toutes. Et puis, il y a aussi les transmissions et traductions qui ont pu influer et amener à plusieurs définitions de Mulā Bandha. Et alors, maintenant, on fait quoi ?
La réponse va sûrement te sembler facile, mais pour moi, c’est à toi de choisir. Je ne pense pas que, le fait de contracter l’avant, l’arrière, le centre, ou bien tout ensemble, dans cette zone, va faire que certain.e.s pratiquent Mulā Bandha correctement, et d’autres non. Car globalement, on est d’accord, sur une vingtaine de centimètre en longueur, et 10cm de large, chacun des points cités ci-dessus se trouvent sur cette même zone : le périnée.
Si on me demande personnellement mon avis, sur ma pratique. Ce qui me parle le plus, sur Mula Bandha, c’est la contraction du périnée, plutôt centrale, qui vient également solliciter une partie des muscles vers l'arrière.
J'ai découvert récemment que certains textes vont même jusqu'à distinguer les 3 types de contraction dont nous avons parlé : les muscles du périnée "avant", ceux du centre, ou bien celui du sphincter anal, comme on peut le voir sur le schéma ci-dessous. Et en fonction de mes pratiques et des postures, je varie entre les trois, j'expérimente lequel me permet de ressentir le plus cette sensation de "verrou de la base".
Vajroli Mudra (pour les hommes) ou Sahajoli Mudra (pour les femmes) : Le geste de la remontée spontanée. Pour l'activer, c'est la sensation de stopper d'uriner qui intervient ici. Pour simplifier, le but de ce mudra est de diriger l'énergie sexuelle (qui tend plutôt à s'échapper de cette zone) vers une pratique spirituelle.
Ashwini Mudra (=Mudra de la jument) : Pour le pratiquer, il faut contracter les muscles du sphincter anal. Sa maîtrise permettrait de limiter la fuite de Apana Vayu, une énergie qui est descendante. On rejoint donc ici le même but que Mulā Bandha.
L'idée n'est pas ici de complexifier le sujet, mais simplement de mettre à plat tous les termes que vous pouvez rencontrer autour de Mulā Bandha!
J'espère en tout cas avoir pu éclairer vos recherches dans cette quête ☀️
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